« Droits humains et enjeux liés aux vbg : quel rôle pour les médias ? » C’est autour de ce thème que les acteurs des médias se sont retrouvés du 18 au 28 septembre dernier à Mamou et Kankan en république de Guinée. Indignés face aux conséquences des vbg, ils se sont engagés à barrer la route à ce fléau qui brise des vies.

Les causes les plus récurrentes aux violences basées sur le genre (vbg) sont : pauvreté, ignorance, méconnaissance des droits et devoirs citoyens, jalousie et pesanteurs socioculturelles. Quant aux conséquences, elles sont lourdes : stigmatisation, stérilité, pauvreté, maladies et parfois même la mort.
La formatrice Fatoumata Timbonké Diallo a mis le doigt sur les types de vbg, à savoir les violences physiques, psychologiques, verbales, sexuelles et économiques. Le harcèlement, le viol et les mgf (mutilations génitales féminines) constituent des formes de violences, a expliqué celle qui est membre active du Club des jeunes filles leaders. Malheureusement, ajoute-t-elle, les vbg ne vont pas sans conséquences sur les enfants et les professionnels de la prise en charge des survivantes. En outre, plusieurs types de stress tel que le stress post traumatique ont été identifiés comme conséquences du viol et des mgf.

Dans la même veine, l’expert d’Avocats Sans Frontières France a souligné plusieurs freins à l’épanouissement de la femme. « L’autocensure des victimes, l’impunité des auteurs et surtout des pans ataviques de nos traditions ancestrales continuent de réduire la femme à une catégorie d’êtres humains dont on peut disposer quand on veut », a déploré Moussa Bayo, demandant plus d’empathie et d’humanité.
Rien qu’en 2017, 96% des femmes en Guinée ont subi des mutilations génitales, 63% un mariage précoce et 85% des violences conjugales. Encore aujourd’hui, les vbg ont du mal à reculer, regrette le formateur. Les participants ont évoqué des cas concrets, des témoignages et des réalités vécues. Les 26 critères de non-discrimination ont été passés en revue ; la classification socioculturelle qui relègue à l’endogamie certaines castes a été dénoncée.

Les droits humains sont indivisibles, interdépendants et universels, a relevé Cellou Ba du Cpdh. Pour lui, les vbg sont des atteintes graves aux droits en général et aux droits de la femme en particulier. « Tout type de vbg, enchaîne-t-il, est en contradiction avec les conventions et accords internationaux ratifiés par notre pays la Guinée. C’est le cas du protocole de Maputo, la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes appelée Cedaw et même la nouvelle constitution guinéenne ».
Les solutions envisagées aux vbg restent la sensibilisation, la réparation des victimes sans oublier la répression des auteurs. « Nos lois sont bien rédigées mais peu appliquées en matière de sanction des auteurs de vbg. Cela doit être corrigé », ont fait remarquer les formateurs. A l’étape de Kankan, les formateurs ont présenté la charte de kurukanfuga vieille de 800 ans et l’ont soumise à la réflexion des stagiaires. A la lumière des débats, il ressort que malgré ses imperfections, cette charte contient plusieurs articles qui exigent un respect absolu de la femme et un caractère sacré des liens du mariage.

Un tour d’horizons des normes de déontologie et les techniques rédactionnelles ont précédé les principes d’éthiques dans la rédaction des cas de vbg. Pour l’expert d’ASF France, le journaliste n’a pas vocation à heurter les sensibilités, à davantage enfoncer la victime ni à transformer son micro ou sa plume en un bûcher incandescent, prévient Moussa Bayo avant d’encourager ses confrères et consœurs à plus d’humanité, de discrétion et de discernement lors du traitement des vbg. ‘Le journalisme dialogique’ a été invité comme principe important d’inclusion mais aussi de distanciation chez le journaliste, souligne Timbonké Diallo. La connexion était ainsi établie entre vbg et rôle des médias.
Les deux séminaires se tenaient dans le cadre du projet LIBRE « Lutte contre l’impunité des auteurs des violences basées sur le genre afin de renforcer l’égalité de genre en Guinée » financé par l’Union européenne et mis en œuvre par le consortium Avocats Sans Frontières France, le Centre guinéen de Promotion et de protection des Droits de l’Homme (CPDH) et le Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée (CJFLG).

Djénabou Dramé, représentante en Guinée d’ASF France, a plaidé en ces termes : « Les médias sont des acteurs essentiels capables de déconstruire les stéréotypes, briser le silence et donner de la visibilité aux victimes qui trop souvent restent dans l’ombre. ». Elle demande aux journalistes de « s’impliquer activement pour éradiquer ce fléau de vbg en dénonçant chaque acte de barbarie commis sur le genre. »
Les autorités présentes au séminaire ont apporté leur soutien aux journalistes et ont encouragé ASF France dans une continuation de telle action de formation. Les enseignements reçus ont eu leurs effets sur les 40 acteurs des médias formés à Mamou comme à Kankan. Par la voix de leur représentante, ils se sont engagés à briser le silence. « Nous faisons désormais de ce combat le nôtre ; et nous souscrivons entièrement à la compétition concernant la production d’articles sur les vbg dans nos régions », promet Djékoria Kanté de la radio rurale de Kouroussa.
Mandé Adams
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