À Biankouma, précisément à Ouindié, la culture de la tomate est devenue source de prospérité pour de nombreux jeunes. Notamment des jeunes déscolarisés qui en ont fait une activité principale. Incursion à Ouindié.
“Produire et commercialiser plus de 100 tonnes de tomates fraîches au titre de l’année agricole 2024. Produire cette denrée de façon régulière chaque année, en vue de faire de Ouindié le royaume de la tomate dans la région du Tonkpi “. Tel est l’objectif que veut atteindre, à moyen terme Ouindié. Une localité située à 35 km du chef lieu du département de Biankouma dans la région du Tonkpi ( Côte d’Ivoire). Depuis 5 années ( 2019 _2024), dans ce village, des jeunes dont l’âge varie entre 18 et 40 ans font de la production et la commercialisation de la tomate leur activité dominante. Une tomate cultivée aux sommets et aux flancs des montagnes, aux qualités exceptionnelles et très prisée des consommateurs.
De la tomate ici. De la tomate là. De la tomate presque partout , aux flancs des montagnes et chaînes de montagnes qui auréolent Ouindié. Des vergers de tomates qui s’étendent à perte de vue. Les superficies exploitées vont de : 0,25 ha à 02 ha. On estime à plus de 30 jeunes, le nombre d’exploitants agricoles. Presque tous des jeunes déscolarisés. Niveau d’étude : cours préparatoire deuxième année ( CM2), pour certains. 5eme , 4 eme, 3 eme et 2 nd pour d’autres. On estime à : 30 , 40, 80 ou 100 cageaux de tomates, pesant chacun 50 kg produits tous les 4 mois. La production agricole est transportée à Biankouma avant d’être écoulée. Les acquéreurs sont pour la plupart des femmes qui viennent d’Odienné , Duekoué, Man et parfois d’Abidjan.
Le prix de vente du cageau n’ est pas fixe. Il varie selon les saisons. Ce prix peut baisser ou augmenter. Des années en arrière, particulièrement en 2023, il était de : 35 mille francs cfa . Aujourd’hui, 12 mai 2024, il est à 30 mille francs CFA. Les tomates produites à Ouindié sont très prisées à cause de leurs qualités exceptionnelles. Mâtures, elles sont grosses et de couleur rougeâtre. Elles sont très délicieuses. Leur durée de vie après la cueillette est de 2 semaines, avant d’ être avariées. Les différentes parcelles exploitées sont situées aux flancs des montagnes. Une montagne formée de roches granitiques, au sol très fertile, riche en humus et en calcaire issu de la décomposition des rochers. À cette endroit , l’air est frais, pur et léger. Ici, les plantes de tomates reçoivent à la verticale les riches rayons de soleil . L’ eau utilisée pour arroser les jeunes plantes est puisée dans des sources naturelles situées au pied des montagnes. Dans cette contree , les paysans n’ ont pas besoin d’engrais pour rendre vigoureuses les plantes et obtenir une bonne production. La conjugaison de tous ces facteurs naturels donne à la tomate produite à Ouindié sa qualité exceptionnelle. Il se raconte aussi que les tomates en provenance de Ouindié seraient exposées dans des rayons des supermarchés de San Pedro, Yamoussoukro, et Abidjan ( Côte d’Ivoire). À Ouindié, la culture de la tomate se fait encore avec des moyens rudimentaires. Notamment, à l’aide de la main, de la machette, de quelques arrosoirs et naturellement une petite dose de courage.
Lorsque la production de la tomate donne espoir et fait vivre.
“Lutter contre la précarité et améliorer le quotidien” est à l’origine de l’engagement des jeunes rencontrés, dans la dynamique de l’exploitation des jardins potagers. La pratique de cette activité semble donner satisfaction aux uns et aux autres. Et du coup, le phénomène du retour à la terre des jeunes est en plein essor à Biankouma.
Ouesse Bounin Romain est né en 1993. Il a été élève au collège moderne de Biankouma. Il a fréquenté jusqu’en classe de 4eme. Depuis 5 années, il est maraicher. Il fait de la culture de la tomate son activité dominante.” C’est en 2019 que j”ai débuté la culture de la tomate. C’était par simple imitation. J’ai réalisé seulement 50 m2 et j’ai déboursé la somme de 4 mille francs CFA pour acheter un demi pot de graines de tomates sélectionnées. Après un trimestre d’intense travaux champêtres, j’ai recolté 30 cageaux de tomates. Grande fut ma surprise, lorsque après la vente, j’ai gagné la somme de 5 00 mille francs CFA. Je dis et je répète la somme de 500 mille francs CFA. Motivé, j’ai augmenté la superficie de mon jardin potager en vue d’ accroître mon revenu. Ainsi, en 2023, j’ai réalisé 0,75 ha de tomates et au terme des différentes récoltes, j’ai réalisé un chiffre d’affaire global de plus de 3,5 millions de francs CFA. Grâce à l’exploitation de la tomate, je subviens sans encombres aux besoins matériels de ma petite famille. Je suis aujourd’hui capable d’envisager la matérialisation de certains projets socio économiques qui me sont chers. Notamment, la construction d’une résidence décente au village et d’une maison modeste à Biankouma.” a dit Ouessé Romain.
Un peu plus loin, Gouéssé Hamed, 24 ans, marié et père d’un enfant raconte : ” hésitant au départ, c’est seulement en 2023 que je me suis investi dans la culture de la tomate, en exploitant 0,25 hectare. Je n’avais que 5 mille francs CFA . J’ai acheté une boîte de graines de tomate. Soutenu par d’autres camarades du village dans l’exécution des travaux champêtres, au bout de quatre mois, j’ai recolté environ 30 cageaux de tomates.Vendus à 17.500 francs CFA le cageau. J’ai après la première vente engrangé la somme de 550 mille francs CFA . Toute la nuit, j ai discrètement compté et recompté la liasse d’argent et j’ai fini par les dissimuler dans un coin Secret de ma maison d’habitation. Depuis, j’ exploite 1 hectare de tomates, avec le précieux désir d’avoir après la vente 2 à 3 millions de francs CFA. Pourquoi pas plus de 5 millions de francs au terme de l’année agricole 2024 ? Cela est possible ! Ainsi, je pourrai m’ acheter une moto pompe flambant neuve pour améliorer mon rendement agricole.” a conclu le jeune Gouéssé.
Yoro Tia Théodore, âgé de 28 ans, est le président des jeunes de Ouindié. Ancien élève en classe de 3 ème, il a plusieurs fois passé le BEPC sans succès. Depuis 2020, il est retourné auprès des siens au village. Il s’est investi dans la culture de la tomate début 2021. Après 3 années d’activité, les résultats financiers obtenus sont encourageants. Et même très encourageants. La 1ere année , il a réalisé 0,25 hectare et n’ a malheureusement recolté que 8 cageaux. Soit seulement 400 kg de tomates, pour 280 mille francs CFA gagnés. Loin d’être découragé , il a continué à travailler. En 2023, avec une superficie de 0,75 hectare de tomates réalisé, il a engrangé 4 millions de francs CFA au terme de l’année agricole.
Yoro Tia T. profite de son titre de président des jeunes pour régulièrement sensibiliser les autres jeunes restés en ville. Il les exhorte à revenir au village pour s’investir dans l’agriculture. Une mission qui commence à porter ses fruits. De plus en plus de jeunes originaires de Ouindié partis à Daloa, Yamoussoukro, Abidjan, San Pedro … à la recherche d’un emploi en vue d’améliorer leur condition de vie retournent aujourd’hui au village. Ils sont actuellement une trentaine de jeunes revenus à la maison qui font de la culture et la commercialisation de la tomate leur activité dominante.
Yoronin Moussa, lui a plus de 55 ans. Il est le vétéran des producteurs de tomates à Ouindié. Il y est également le plus grand producteur de cette denrée. En 2023, il a régulièrement récolté 80 à 100 cageaux. En 2024, Yoronin ambitionne commercialiser de façon constante 150 cageaux après chaque recolte .” La tomate à Ouindié a valeur de diamant. La production et la commercialisation de ce fruit sèment la joie dans de nombreux cœurs et dans de nombreux foyers. L’exploitation de la tomate fait gagner de l’argent. Sans exagération, elle fait gagner suffisamment d’argent en un temps record. La tomate nourrit, enrichit, rend heureux et à coup sûr, la tomate facilitera notre intégration dans le tissu socio économique de la région du Tonkpi.” Nous a confiés Yoronin Moussa, visiblement très enthousiaste.
Ouindié, le royaume de la tomate? Un défi majeur cher aux jeunes maraîchers. Pour réussir ce challenge, au chapitre des doléances, ceux-ci souhaitent bénéficier de l’appui de l’ état, à travers la réalisation des travaux de réhabilitation régulière de l’ axe Ouindié_ Biankouma, distant de 35 km, en vue de faciliter l’écoulement vers Biankouma des produits agricoles. Surtout pendant la saison des pluies ( juin à septembre). Bénéficier d’un encadrement technique adéquat des agents de l’ agriculture et de l’ Anader, pour s’approprier des techniques culturales modernes et enfin bénéficier de fonds de soutien aux jeunes maraîchers.
Honoré Droh