Les populations riveraines du Parc national du Mont Sangbé ont réaffirmé leur engagement pour la préservation de cette aire protégée emblématique de l’ouest de la Côte d’Ivoire. Réunies à Massala Gouran, le 8 octobre dernier, autour du sous-préfet de Kamalo, des responsables de l’Office ivoirien des parcs et réserves (OIPR) et des autorités coutumières, les communautés de Tounan, Koola, Sagoura Sanon et Massala Gouran ont pris un engagement fort : œuvrer, jour et nuit, à la sauvegarde du patrimoine naturel qui les entoure.

Cette rencontre de sensibilisation a mobilisé chefs de villages, leaders communautaires, leaders des jeunes et des femmes, responsables des chasseurs traditionnels Dozo et représentants des pêcheurs. Elle s’inscrivait dans le cadre des actions de proximité menées par la Direction de la zone ouest de l’OIPR pour renforcer la collaboration entre les populations et les gestionnaires du parc. Représentant le Directeur de zone, le colonel Assui Wa Kassi N’guessan Dawy, chargé d’étude, a livré un exposé didactique sur la valeur écologique et socio-économique du parc.
Dans une intervention empreinte de pédagogie et de réalisme, le colonel Assui Wa Kassi a rappelé que « le parc n’est pas seulement une forêt », mais une véritable richesse pour toute la région. « C’est grâce au parc que les rivières continuent de couler, que l’eau arrive dans les champs, que nous pouvons faire de l’agriculture et de l’élevage », a-t-il souligné, citant les cours d’eau comme le Bafing et la rivière Baba, qui prennent leur source dans le Mont Sangbé. Selon lui, la conservation du parc est directement liée à la survie économique et environnementale des villages environnants.
Le représentant de l’OIPR a déploré la disparition progressive de certaines espèces emblématiques, notamment l’éléphant, autrefois symbole du parc. « Depuis 2012, on ne voit plus d’éléphants dans le Mont Sangbé. Ils ont fui à cause du braconnage », a-t-il regretté, tout en précisant que d’autres espèces, comme la panthère, les antilopes, les chimpanzés et de nombreux oiseaux, subsistent encore grâce aux efforts de protection. Il a expliqué le rôle écologique crucial des grands mammifères dans la régénération des forêts et la stabilité du climat local.

Abordant la question du développement local, le colonel Assui Wa Kassi a insisté sur les opportunités offertes par une bonne conservation du parc, notamment à travers le tourisme vert. « Quand le parc est bien protégé, il attire les visiteurs. Cela peut créer des emplois, favoriser la vente de produits artisanaux, et générer des revenus pour les villages », a-t-il indiqué. Il a également évoqué le Prix Vert, une initiative incitative de l’OIPR qui récompense chaque année les villages les plus engagés dans la protection du parc, avec une enveloppe globale de trois millions de francs CFA.
Toutefois, le colonel a alerté sur les menaces persistantes : le braconnage, les feux de brousse et la pêche illégale sur le Bafing. « Chaque année, nos agents découvrent des cartouches, des pièges, et parfois des animaux tués. Si cela continue, nos enfants ne verront plus jamais ces espèces », a-t-il averti. Il a appelé les habitants à devenir des relais de vigilance en signalant tout acte de braconnage ou de dégradation, même de manière anonyme, auprès des agents de l’OIPR ou du sous-préfet.
Au nom des quatre villages, le porte-parole Koné Siaka a pris la parole pour sceller cet engagement collectif : « Nous avons compris que le Parc national du Mont Sangbé est vital pour notre survie, pour notre agriculture et pour le climat. Nous nous engageons à le protéger, 24 heures sur 24, et à dénoncer tout braconnier ou délinquant. » Il a également promis que les villages mettront tout en œuvre pour mériter le prochain Prix Vert et devenir un modèle de cohabitation harmonieuse avec la nature.

Le sous-préfet de Kamalo, M. Ipou Konan Julien, représentant le préfet de la région du Worodougou, a salué cette mobilisation exemplaire. « Le préfet m’a chargé de vous exprimer toute sa reconnaissance pour votre engagement. Ce que vous venez de faire aujourd’hui est capital pour l’avenir de notre environnement », a-t-il déclaré. Tout en félicitant les communautés pour leur sens du civisme écologique, il a promis un suivi rigoureux des engagements pris et plaidé pour l’extension du dispositif de sensibilisation à d’autres villages riverains des fleuves Bafing et Sassandra.
En clôturant la rencontre, les autorités locales et les représentants de l’OIPR ont réaffirmé leur détermination à travailler main dans la main avec les populations. Dans un climat de fraternité et de responsabilité partagée, la cérémonie s’est achevée sur une note d’espoir. Le Mont Sangbé, sanctuaire de biodiversité et source de vie pour tout le Worodougou, peut compter sur ses gardiens naturels : les habitants de Tounan, Koola, Sagoura Sanon et Massala Gouran, désormais unis dans un même combat pour la conservation du patrimoine ivoirien.
Kindo Ousseny