Edito/ Eco : Quand le leadership ivoirien insupporte le Nigeria

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Le jeudi 16 janvier, les ministres des pays de la Zone monétaire ouest africaine (ZMAO) comprenant le Nigeria, la Sierra Leone, Le Liberia, le Ghana et la Guinée ont produit un communiqué, à l’issue d’une rencontre à Abuja, capitale fédérale du Nigeria, pour dénoncer la décision “unilatérale” de la Côte d’Ivoire de rebaptisé le CFA en Éco, future monnaie de la CEDEAO.

Cette dénonciation de ces pays surprend à plus d’un titre. D’abord elle intervient près d’un mois après la déclaration d’Abidjan, le 21 décembre dernier,  par le président Alassane Ouattara de débaptiser le CFA. Ensuite la deuxième raison tient au fait que suite à l’annonce faite par le président ivoirien, la CEDEAO dont sont membres ces pays de la ZMAO a produit un communiqué pour se féliciter des ” progrès enregistrés“. Notons au passage que le gouvernement ghanéen qui a salué la déclaration historique d’Abidjan de rebaptiser le CFA est allé dans le même sens que l’organisation sous régionale à travers la production d’un communiqué où il indiquait sa volonté d’adopter l’Eco. Toutefois, le voisin ghanéen a souligné son souhait d’aller vers une monnaie flexible plutôt qu’une monnaie à la parité fixe.

Enfin, le troisième motif et la plus importante, c’est que conformément au mécanisme de mise en œuvre de la monnaie unique de la CEDEAO, il a été arrêté que les pays qui respectent plus ou moins les critères de convergence devraient être les premiers à se lancer. Or, au sein de la CEDEAO, seuls les huit  pays de l’UEMOA, ayant en partage le franc CFA sont les plus aptes à respecter ces critères de convergence. En, d’autres termes les pays de l’UEMOA devraient être le noyaux de départ de la monnaie unique de l’organisation sous régionale. Il est donc étonnant que les pays de la ZMAO remettent en cause cette démarche décidée et arrêtée de commun accord. On pourrait légitimement s’interroger: que veulent le Nigeria et Cie, presque tous des pays anglophones à l’exception de la Guinée qui d’ailleurs a rejoint le mouvement en 2010, soit 10 ans après sa création?

La réponse à cette question est claire et sans ambages. Il ne s’agit ni plus ni moins que de la sempiternelle guéguerre entre pays anglophones et francophones. Et singulièrement d’une guerre de leadership dans la sous région entre la Côte d’Ivoire et le Nigeria sur la question de la monnaie commune. Au sein de la CEDEAO, le Nigeria constitue un ogre face aux autres États en terme d’économie (PIB 2019: 445 milliards de dollars US) et de populations ( plus de 200 millions d’habitants). Compte tenu de ces atouts indéniables, il a toujours eu le leadership sur les affaires sous régionales. Ce qui ne semble pas être le cas avec l’Eco. Sur ce point justement, la Côte d’Ivoire est en passe, si ce n’est déjà fait, de damer le pion au pays de Buhari. Cela à juste titre d’ailleurs.

Le président ivoirien s’y connait très bien en matière de monnaie et d’économie. Alassane Ouattara a été gouverneur de la BCEAO et DGA du FMI. Parmi tous les chefs de la CEDEAO, en fonction, qui mieux que lui pouvait conduire cette politique monétaire. Raison pour laquelle, ces pairs au sein de l’UEMOA lui ont pratiquement confié la gestion de cette transition monétaire. Mais, du côté du géant nigérian, la pilule a du mal à passer. Au détriment de l’intégration sous régionale.

 

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