Interview avec Bamba Mamadou/ Entrepreneur dans la valorisation des déchets plastiques : ” Notre vision est de devenir la plus grande déchèterie de Côte d’Ivoire”

Temps de lecture : 6 minutes

Jeune entrepreneur dans la valorisation des déchets plastiques, Bamba Mamadou est le gérant de l’Unité de Valorisation des Déchets Plastiques (Univalplast). Ambitieux, il entend devenir le leader de la déchèterie de la Côte d’Ivoire à travers sa structure. Dans cette interview, il nous parle de l’actualité de Univalplast, de ses perspectives dans le monde des déchets plastiques et de ses ambitions en tant que jeune entrepreneur.

Man-infos.net : Pouvez-vous nous parler de vos débuts à Man et de ce qui vous a inspiré à vous lancer dans la valorisation des déchets plastiques ?

Bamba Mamadou : Mes débuts dans la valorisation des déchets plastiques ont été inspirés par une rencontre. J’étais chef de bureau d’une ONG, et il y a eu une journée de présentation du projet de valorisation des déchets plastiques, un projet du gouvernement avec les ex-combattants. Ayant été invité, je suis allé à cette rencontre. J’étais également impliqué dans un projet environnemental dans le service où je travaillais, et j’ai donc décidé d’apprendre le métier de valorisation des déchets avec l’Unité de Valorisation des Déchets (UVD) de Man.

Quel rôle a joué l’obtention du prix BJKD dans votre carrière et le développement de l’Unité de Valorisation des Déchets Plastiques Univalplast Africa ?

Le prix BJKD, c’est le prix Bénédicte Janine Kacou Diagou. Je remercie la fondatrice du prix, madame Bénédicte Janine, qui aide les jeunes entrepreneurs et fait la promotion de l’entrepreneuriat en Côte d’Ivoire. Ce prix a permis de faire connaître la valorisation des déchets plastiques en pavé, un domaine qui existait mais qui n’était pas bien connu. Notre participation à ce concours visait à promouvoir le projet de production de pavés écologiques et à renforcer notre capacité avec une nouvelle machine. Grâce à ce prix, nous avons pu acheter une machine à Canon qui a augmenté notre production de pavés écologiques, permettant ainsi une avancée significative.

Quelles ont été les principales difficultés que vous avez rencontrées lors de la création de Univalplast Africa et comment les avez-vous surmontées ?

Après l’apprentissage au sein de l’UVD Man, nous avons rencontré des difficultés qui nous ont retardés. Nous avons été déguerpis de notre site de production à Man par la mairie, et il a été difficile de reprendre. Nous avons été relocalisés sur un site inadapté. C’est à ce moment-là que l’Unité de Valorisation des Déchets Plastiques (UNIVALPLAST) Africa a été officiellement créée par moi-même, Bamba Mamadou. Quitter Man pour Abidjan a été un grand défi, avec des difficultés liées à la recherche de site et au manque de financement.

En quoi consiste exactement le processus de valorisation des déchets plastiques chez Univalplast Africa ?

Le processus de valorisation consiste à transformer les déchets plastiques en divers dérivés écologiques. Il y a plusieurs étapes de transformation : collecte, tri, lavage, découpage, broyage, chauffage et malaxage pour leur donner une nouvelle forme. Nous avons sept catégories de déchets plastiques à traiter.

Comment Univalplast Africa contribue-t-elle concrètement à la lutte contre la prolifération des déchets plastiques en Afrique ?

La collecte des déchets plastiques est une véritable révolution pour réduire leur prolifération. En les transformant, nous réduisons considérablement leur présence dans l’environnement. Nous menons également des campagnes de sensibilisation pour encourager les ménages et les entreprises à trier et collecter les déchets plastiques. Nous sommes accompagnés par l’Association Ivoirienne pour la Valorisation des Déchets. Depuis deux ans, nous avons collecté plus de 300 à 400 tonnes de Polyéthylène Téréphtalate (bidons d’eau et de boissons) et plus de 6000 tonnes pour d’autres déchets plastiques. En tout, nous avons collecté entre 4000 et 5000 tonnes de déchets plastiques (LDPE, HDPE, PVC).

Pouvez-vous nous parler des produits dérivés que vous fabriquez à partir des déchets plastiques et de leurs impacts environnementaux?

Nous fabriquons actuellement des pavés écologiques. Le plastique étant une matière malléable, il peut être transformé en divers produits comme des briques, des portes, des chaises et même des bidons recyclés. Tout produit fabriqué avec du bois peut potentiellement être fabriqué à partir de déchets plastiques, grâce à la malléabilité de cette matière et à des machines adaptées. En plus de lutter contre les déchets plastiques, vous embauchez des jeunes.

Quel est l’impact de cette initiative sur la communauté locale?

Nous pensons que nous pouvons combattre la prolifération des déchets plastiques avec le concours de plusieurs partenaires, notamment l’Agence Ivoirienne pour la Valorisation des Déchets, l’ANAGED, les autorités locales et le ministère. Nos principales difficultés sont les financements et le manque de matériel, notamment les machines. Si nous obtenons des financements pour acquérir des véhicules, des machines et offrir des formations, nous pourrons réussir notre mission.

Quelles stratégies mettez-vous en place pour encourager l’autonomisation des jeunes au sein de votre entreprise ?

Nous avons permis à plusieurs associations d’acquérir des chaises et des bâches pour les autonomiser et les encourager à sensibiliser les communautés à la collecte des déchets plastiques. Nous travaillons avec de jeunes collecteurs, des associations de jeunes et de femmes à qui nous offrons des chaises et des bâches pour les impliquer dans la lutte contre la prolifération des déchets plastiques. Nous avons également mené le projet Coca-Collecte, financé par la Fondation Coca-Cola et soutenu par l’Association Ivoirienne pour la Valorisation des Déchets Plastiques (AIVDP).

Comment voyez-vous l’évolution de Univalplast Africa dans les cinq prochaines années ?

Notre vision est de devenir la plus grande déchèterie de Côte d’Ivoire. Nous avons un nouveau site avec une grande usine de traitement des déchets plastiques et d’autres déchets. Nous travaillons sur des projets comme la transformation des déchets plastiques et des déchets organiques. Nous prévoyons d’implanter ces projets sur plusieurs hectares pour créer une usine capable de valoriser une grande quantité de déchets plastiques produits en Côte d’Ivoire. En Côte d’Ivoire, la prolifération des déchets plastiques est un problème majeur.

Comment Univalplast Africa s’attaque-t-elle spécifiquement à ce défi ?

Nous commençons par la collecte des déchets plastiques, puis nous les traitons et les transformons. Depuis notre création en 2018, nous avons valorisé plus de 4000 tonnes de déchets plastiques. En collaboration avec l’Association Ivoirienne pour la Valorisation des Déchets Plastiques (AIVDP) et la Fondation Coca-Cola, nous maximisons notre collecte et valorisons encore plus de déchets plastiques.

Pensez-vous réellement pouvoir combattre efficacement la pollution due aux déchets plastiques en Côte d’Ivoire ? Quels sont les principaux obstacles et comment prévoyez-vous de les surmonter ?

Nous pensons réellement pouvoir combattre la prolifération des déchets plastiques avec l’aide de partenaires tels que la société civile ivoirienne pour la valorisation des déchets, l’ANAGED, les autorités locales et le ministère. Nos principales difficultés sont le financement et le manque de matériel. Si nous obtenons des financements pour acquérir des véhicules, des machines et offrir des formations, nous réussirons notre mission.

Quel conseil donneriez-vous aux jeunes entrepreneurs du district des montagnes qui souhaitent se lancer dans des projets similaires ?

Mon conseil est d’avoir une vision claire et de mettre en œuvre des actions concrètes pour réaliser cette vision. Il y aura des difficultés, mais il faut être résilient pour les surmonter. L’entrepreneuriat est rempli de défis, et c’est en les affrontant que vous atteindrez vos objectifs. Ne vous concentrez pas uniquement sur l’argent, mais persévérez même en cas de chute.

Pouvez-vous nous parler du plus grand rendez-vous des jeunes entrepreneurs du district des montagnes que vous organisez ?

Le Grand DEJ est un rassemblement des entrepreneurs et aspirants entrepreneurs du district des montagnes. Nous nous rencontrons pour échanger sur différents sujets concernant l’entrepreneuriat, partager nos expériences, nous former et organiser des conférences.

Quels sont les objectifs principaux de cet événement et quels impacts espérez-vous avoir sur les participants ?

L’objectif principal est de créer un cadre de concertation entre les entrepreneurs et aspirants entrepreneurs du district des montagnes. Nous voulons créer des opportunités, des projets et de la richesse pour être des moteurs du développement de notre région. Nous avons également mis en place le Brunch des entrepreneurs, une rencontre annuelle entre jeunes entrepreneurs, aspirants entrepreneurs avec des projets concrets et investisseurs. Cela dynamisera la création de richesse dans notre district.

Quel rôle joue l’entrepreneuriat dans le développement durable et la lutte contre le chômage chez les jeunes, selon vous ?

L’entrepreneuriat joue un rôle crucial dans le développement durable et la lutte contre le chômage chez les jeunes. En créant des entreprises, on génère de la richesse, ce qui entraîne naturellement la création d’emplois. Quand des emplois sont créés, cela autonomise les individus et améliore l’indice de développement urbain, contribuant ainsi au développement durable. En résumé, l’entrepreneuriat est le moteur du développement durable et de la création d’emplois, et donc de la lutte contre le chômage.

Avez-vous des partenaires ou des collaborations avec d’autres organisations ou entreprises pour soutenir vos initiatives ?

Effectivement, nous avons des partenaires depuis la première année de nos initiatives, y compris des chaînes de télévision qui nous aident en matière de communication visuelle. Plusieurs jeunes entrepreneurs nous ont également soutenus financièrement. Le maire de la commune de Man nous accompagne chaque année, tout comme diverses entreprises et établissements privés. Nous avons également plusieurs partenaires locaux, et les jeunes sont aussi nos partenaires puisqu’ils achètent des tickets pour participer à nos activités.

Comment les gouvernements et les institutions locales peuvent-ils mieux soutenir les initiatives comme la vôtre ?

Nous demandons aux institutions locales et au gouvernement de nous intégrer dans leurs programmes triennaux ou annuels. À part le maire qui nous soutient, les autres institutions ne nous suivent pas pour l’instant. Nous souhaitons être inclus dans les programmes des institutions telles que le conseil régional, la mairie et le district des montagnes, afin de ne pas rencontrer de difficultés chaque année pour organiser nos activités. Nous avons la volonté de faire avancer les choses, mais sans leur aide en termes de financements, d’accompagnement et de renforcement des capacités, il sera difficile de progresser. Cependant, en tant qu’entrepreneurs déterminés, nous continuons à avancer malgré les obstacles pour atteindre nos objectifs.

Entretien réalisé par Seydou Badian

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