La ville de Man a abrité ce vendredi 18 juillet 2025 la célébration de la 38e Journée internationale de lutte contre l’abus et le trafic illicite de drogues. Une célébration marquée par des conférences, des visites de stands, des récompenses et surtout des messages forts, à l’hôtel communal, en présence des autorités locales, de forces de sécurité, d’experts et de nombreux jeunes. Le préfet de la région du Tonkpi, représentant le ministre de l’Intérieur et président du CILAD, a lancé un appel solennel : « Que chaque village, chaque école, chaque quartier devienne un bastion de la lutte contre la drogue ».

Dès l’ouverture, le 5e adjoint au maire, Bamba Issiaka représentant le conseil municipal, a exprimé la joie de la commune d’accueillir cette célébration : « Notre jeunesse peine encore à échapper à l’emprise des véritables trafiquants. » Il a salué les efforts des forces de sécurité, des éducateurs et de la société civile, soulignant que la mobilisation de tous est indispensable. « Une société saine, responsable et libérée des ravages de la drogue est possible si chacun joue sa partition », a-t-il insisté.
Le vice-président du Conseil régional du Tonkpi, Tonkpa Maninga a quant à lui rappelé la vulnérabilité géographique de la région, située à la frontière avec le Libéria et la Guinée : « Ce contexte favorise la prolifération de drogues. C’est pourquoi la police de proximité et la construction d’infrastructures scolaires sont des réponses locales pour prévenir l’oisiveté et enrayer l’addiction. » Il s’est félicité des tonnes de drogues saisies chaque année par les forces de sécurité.
Dans son discours, le préfet de la région du Tonkpi, préfet du département de Man, Soro Fatogoma a présenté des chiffres révélateurs de l’ampleur du phénomène. En 2023, plus de 421 kg de cannabis, 77 kg de cocaïne et 421 g d’héroïne ont été saisis dans la région. « Chaque fumoir détruit est une vie potentiellement sauvée. » Il a mis en avant la loi 2022-407, « une avancée majeure qui privilégie désormais le traitement des usagers et frappe fort les trafiquants », en appelant à une synergie entre toutes les composantes de la société.

Le préfet a salué le dévouement de toutes les parties et remercié au nom du ministre les acteurs mobilisés : « Investir dans la prévention, ce n’est pas un luxe. C’est un devoir envers les générations futures. »
Le commissaire Koné Tinnon, chef de l’antenne régionale de la DPSD, a profité de la tribune pour déplorer « la non-collaboration des populations », avant de lancer un appel aux leaders communautaires, religieux et aux familles : « Ce combat ne doit pas rester entre les mains des seuls policiers. Il s’agit de sauver nos enfants. » Il a tenu à rassurer les populations quant à la confidentialité des informations et à la protection des informateurs.
La voix du Comité interministériel de lutte antidrogue (CILAD), incarnée par son secrétaire général, le professeur Kouma Yao Ronsard Odonkor, a rappelé que la Côte d’Ivoire est devenue un modèle en Afrique grâce à sa législation. « Même la France n’a pas encore une loi aussi complète que la nôtre. » Il a souligné les efforts du ministre de l’Intérieur qui a porté cette réforme à bout de bras. « L’usager n’est pas un délinquant. C’est une victime. Le véritable criminel, c’est le dealer », a-t-il martelé, insistant sur les enquêtes patrimoniales désormais possibles pour frapper les trafiquants au portefeuille.

Les journées ont été aussi marquées par des actions concrètes : une formation à destination des forces de défense sur les techniques spéciales d’enquête et sur les méthodes de recrutement des jeunes par les groupes terroristes. En parallèle, des enseignants et des professionnels de santé ont été formés à la prévention et à la prise en charge. Le programme a également inclus des activités sportives et l’organisation d’un concours dénommé « Jeunes cracks : Non à la drogue ».
Le docteur N’Guessan Badou Roger, chef du service traitement au CILAD, et le commissaire Koffi Brou Jean-Claude ont animé une conférence sur le rôle crucial des parents dans le contrôle et l’éducation. Leurs exposés ont mis en lumière l’impact psychologique de la drogue et la nécessité d’une prise en charge précoce des jeunes consommateurs.
Une touche d’émotion a émaillé les témoignages du secrétaire général du CILAD sur des jeunes ivoiriens incarcérés au Maroc pour tentative d’immigration irrégulière via des réseaux liés à la drogue. « Ces enfants avaient chacun dépensé cinq millions pour partir. Ils sont aujourd’hui en prison. Et nous, parents, devons-nous remettre en question », a-t-il dit avec gravité.
La cérémonie s’est achevée par une remise de trophées aux autorités engagées, aux forces de sécurité, aux lauréats du concours et à des personnalités locales. Des jeunes ont été sélectionnés pour représenter la Côte d’Ivoire au forum des jeunes contre la drogue à Vienne, en Autriche.
Kindo Ousseny