Treize ans après l’annonce par le président Alassane Ouattara du bitumage de l’axe Guiglo-Taï, l’attente reste insoutenable pour les habitants. La ville de Taï, chef-lieu du département du même nom dans la région du Cavally, se retrouve aujourd’hui quasi isolée du reste du pays. Les routes, dégradées par les pluies récurrentes, sont devenues impraticables, paralysant l’économie locale et plongeant les populations dans le désarroi.

L’axe Guiglo-Taï, long de 85 km, est devenu un véritable calvaire pour les usagers. Les transporteurs mettent souvent deux à trois jours, voire jusqu’à deux semaines, pour effectuer le trajet, à cause de camions embourbés ou de véhicules en panne bloquant la route dans des zones marécageuses. Les points critiques entre les villages de Daobly et Sacré, notamment à environ 25 km de Taï, sont devenus infranchissables. Depuis des semaines, des camions-citernes, ambulances, corbillards et véhicules de transport attendent désespérément le rétablissement de la circulation.
Face à cette situation dramatique, les populations ne savent plus à quel saint se vouer. Tahi Roland, un habitant de Zagné, confie : « Le Président Ouattara est un homme de parole. Nous soutenons sa vision de développement, mais notre route reste un chantier oublié. » Il appelle les plus hautes autorités à agir d’urgence. Le bitumage de l’axe Guiglo-Taï-Tabou, corridor stratégique vers le Libéria, avait été promis en août 2023 par le chef de l’État lors de sa visite dans le Cavally.

Pourtant, cette zone frontalière regorge de richesses agricoles et touristiques, dont les populations ne profitent guère. L’enclavement freine l’écoulement des produits vivriers, fait grimper les prix des denrées et nourrit l’insécurité. Les coupeurs de route profitent du mauvais état des voies pour multiplier les attaques. En parallèle, les atouts touristiques du parc national de Taï restent inexploités, faute d’accessibilité.
Le maire de Taï, Hyppolite Bayalla, se dit à bout. Contraint d’intervenir sur des tronçons critiques avec les maigres ressources de la mairie, il s’appuie parfois sur le soutien de la ministre Anne Désirée Ouloto, présidente du Conseil régional. « Nous faisons ce que nous pouvons, mais seule l’État peut offrir une solution durable », plaide-t-il. Il interpelle le président Ouattara : « Le chef de l’État a transformé la région en matière d’électrification, nous croyons qu’il tiendra aussi cette promesse pour la route. »

Il faut rappeler que depuis 2011, le taux d’électrification du département de Taï est passé de 0 à 100 %, avec les 22 villages désormais connectés au réseau national. Mais pour les populations, l’heure est venue de franchir un autre cap : la désenclaver le département. Elles en appellent au ministre Amedé Kouakou, à la ministre d’État Anne Ouloto, ainsi qu’au gouverneur du District des Montagnes, Albert Flindé.
À quand la fin du supplice pour les habitants de Taï ? Le développement ne peut être complet sans des routes praticables. Les regards sont désormais tournés vers Abidjan, dans l’attente du lancement effectif des travaux tant attendus. Vivement le bitume pour redonner espoir à toute une région.
Serge coulibaly à Duékoué