Dans les régions du Tonkpi et du Bafing, les producteurs du café et de l’anacarde traversent des moments difficiles. Leurs productions sont soit mal achetés ou pas du tout écoulées.
Selon Issaka Ouédraogo, président de la Coopérative Kalman de Man, le café s’écoule difficilement sur le marché. « Il nous a été recommandé par le conseil café cacao de ne pas évacuer le café à Abidjan si nous n’avons pas de partenaire sûr qui puisse l’acheter », a relevé le président de coopérative lui-même planteurs et président de la faitière Usem (Union des sociétés coopératives émergentes des montagnes).
D’après lui, jusqu’à ce jour, des planteurs et des coopératives ont encore dans leurs magasins des stocks de café de l’année dernière et il n’y a pas d’acheteurs. « En début de campagne, on nous a dit de ne pas acheter le café tant que nous n’avons pas de contrat avec un industriel », a-t-il soutenu. Il a par ailleurs rappelé que l’année dernière, le même problème s’est posé au niveau de la commercialisation à l’international. Ce qui a provoqué un engorgement des camions au port autonome d’Abidjan.
Cette situation est durement ressentie dans le monde paysan. « Aujourd’hui, la vie est dure pour les planteurs de café. Les produits n’étant pas vendu, nos braves paysans vivent dans une situation d’extrême pauvreté. Difficile de se nourrir convenablement. Se prendre en charge ou prendre en charge les soins médicaux d’un membre de sa famille en cas de maladie est devenue une pilule amère pour les planteurs », fait remarquer Doua Blondé Obed, président de l’Association des producteurs et organisations professionnelles agricoles de l’ouest montagneux (Apropom). Pour lui, cette mévente est due à des difficultés de commerce extérieur, dont le conseil café cacao est le seul à pouvoir trouver la solution.
Pour l’heure, ce sont les trafiquants qui tirent le meilleur profit en exportant de façon clandestine le café vers la Guinée voisine. Notre interlocuteur a précisé que cela se passe dans la zone frontalière avec le pays d’Alpha Condé. Dans le reste du milieu rural, ce sont des pisteurs véreux qui profitent de la misère des paysans pour leur acheter les produits en dessous du prix officiel qui est de 700 francs le kilogramme. « Actuellement le café se négocient auprès de nos paysans entre 500 et 600 francs, compte tenue de la mévente », ont expliqué la plus part de nos interlocuteurs. C’est pourquoi, Issaka Ouédraogo plaide pour la transformation au niveau local du café afin de pouvoir vendre ces produits dans les pays de la sous-région ouest africaine qui sont d’ailleurs sont de grands consommateurs de café.
Quant au cacao, il s’achète au prix normal de 750 francs. Mais là aussi la qualité des fèves laisse à désirer. « À cause du changement climatique avec pour conséquence l’absence de pluie, le cacao n’est pas bien arrosé et les cabosses ne reçoivent pas suffisamment d’eau. Et si les conditions de fermentations ne sont pas réunies, les fèves contiennent de l’acide et deviennent noires. Ce qui fait que nous n’avons pas un rang honorable en matière de qualité », déplore Issaka Ouédraogo, le patron de l’Usem.
Dans la région du Bafing les producteurs de noix de cajou, face à la mévente dans les normes de leurs produits ont décidé de donner de la voix.
Le lundi 11 mars 2019, ils ont exprimé leur mécontentement au corps préfectoral à Touba. Ce jour-là, ils sont venus nombreux à la préfecture pour se plaindre du non-respect du prix bord champ du kilogramme de la noix de cajou qui est fixé à 375 francs Cfa par l’Etat ivoirien. « Alors que l’Etat a fixé le prix du kilogramme du cajou à 375 frs, nous sommes surpris de voir certains acheteurs et pisteurs nous proposer des prix bas arguant que la qualité de nos produits n’atteint pas celle exigée par les exportateurs », déplore Koné Vamoriba, planteur à Gouekolo.
Poursuivant, il dira que la qualité actuelle des produits du Bafing est liée au changement climatique. « Le manque de pluie a eu un effet néfaste sur les plantations car la quantité d’eau attendue n’a pas été atteinte. Ce qui a fait que les plantes n’ont pas été suffisamment arrosées comme il se doit. Mais malgré cet état de fait, la qualité de nos produits n’est pas aussi mauvaise que ça. Depuis l’année surpassée, le prix du cajou ne fait que dégringoler alors que nous avons placé beaucoup d’espoir dans cette culture. Non seulement le prix fixé n’est pas à la hauteur de nos attentes, mais des acheteurs veulent en diminuer encore. Nous disons ‘’non’’ à cela », a-t-il protesté.
En l’absence du préfet de région, préfet du département de Touba, le Secrétaire Général 1, Achy Yapi Alexandre et le Sous-préfet central Savadogo Adama, ont appelé au calme. En attendant le retour du préfet qui saura apporter des réponses adéquates, ils ont conseillé aux producteurs de dénoncer tout acheteur ou pisteur qui s’adonne à cette pratique. Il est bon de rappeler que tout comme le café dans la région du Tonkpi, plusieurs tonnes de noix de cajou de la région du Bafing n’ont pas été achetées lors de la dernière campagne. C’est donc pour éviter de revivre une situation chaotique similaire que les producteurs ont décidé de prendre leur destin en main pour disent-ils, défendre leurs intérêts.
Kindo Ousseny à Man.