Tonkpi/ Mévente du cacao en Côte d’Ivoire : Les raisons profondes expliquées aux producteurs

Temps de lecture : 4 minutes

Le président national de l’Association des organisations professionnelles agricoles de Côte d’Ivoire, APROPA-CI, Doua Blondé Obed est en tournée dans les régions du Bafing, Guémon, Cavally et Tonkpi depuis le 23 janvier 2021.  Au cours d’une conférence de presse tenue en fin d’après-midi ce vendredi 29 janvier 2021, il a souligné que l’objectif de cette Tournée selon lui est d’expliquer à ses pairs producteurs les raisons de la mévente du cacao et proposer des pistes de solution tout en évitant de tomber dans des crises qui pourraient être préjudiciables pour le monde agricole.  

Cette Tournée qui a commencé depuis plus d’une semaine a conduit le président de l’Apropa-ci dans les départements de Touba, Sipilou, Biankouma, Danané, Duékoué, Guiglo… Dans toutes les localités parcourues, Doua Blondé Obed a signifié aux producteurs que la difficulté dans l’exportation du cacao est une conséquence directe de la pandémie à Coronavirus qui a fragilisé les exportateurs, les chocolatiers et les consommateurs du chocolat. « Avec la pandémie de la COVID 19, les consommateurs de chocolat sont sous confinement. Les usines de production de chocolat ne tournent plus à plein régime. Donc du coup, ils ne sont pas en mesure d’évacuer leurs stocks. Tout est bloqué en Europe, aux Etats unis et en Asie. Plus de bateaux pour envoyer le cacao dans les pays consommateurs de cacao. Et cela ne peut être sans répercussion chez les producteurs », a expliqué Doua Blondé Obed.

Selon lui, des centaines de tonnes de cacao sont stockées dans les magasins des sociétés coopératives. « Plusieurs producteurs qui ont vendu leur cacao aux coopératives depuis plus d’un mois, n’arrivent pas à avoir leur argent. Or, le planteur du cacao ne vit que des revenus de son produit. C’est de çà qu’il se soigne, il se nourrit et scolarise ses enfants. Certains nous ont fait remonter les informations selon lesquelles leurs enfants admis dans des universités sont encore à la maison. Faute de moyens financiers. Ceux qui ont leurs enfants au privé n’ont pu les scolariser », a-t-il souligné. D’après lui, des camions sont chargés depuis plus de 2 semaines et ne savent pas où aller livrer. Ce qui crée des conflits entres les coopératives et les transporteurs qui exigent le paiement intégral des frais de location des camions durant le nombre de jours où les camions sont stationnés.

Il exhorte les planteurs et les coopératives à ne pas céder aux manœuvres de certains d’entre eux qui veulent les inciter à aller à la grève. « Cette situation est une crise mondiale liée à la pandémie de la Covid-19. Une grève ne saurait être une solution. Le gouvernement de Côte d’Ivoire elle-même n’a pas intérêt à ce qu’il y ait un blocage dans la filière cacao. Il faut que le climat social soit apaisé. Une simple étincelle suffit à allumer le feu. Il faut donc se désolidariser de tout ce qui est mouvement de grève et privilégier le dialogue et surtout la négociation », a-t-il conseillé. 

Néanmoins, Doua Blondé Obed estimes que les producteurs n’ont pas à désespérer. L’Apropa-Ci s’est saisie de cette affaire pour proposer des pistes de solution en vue d’atténuer la souffrance des producteurs. « Nous avons saisi un cabinet d’expert pour faire un constat réel des stocks dans les sociétés coopératives, dans les campements, dans les camions de transport, pour que nous puissions produire une traçabilité légale et officielle pour ensuite voir comment aider les sociétés coopératives et les producteurs à sortir de cette crise dans la dignité », a annoncé Doua Blondé Obed. Pour lui, l’Etat qui dans le cadre du confinement du grand Abidjan a déjà assisté tous les opérateurs économiques, doit pouvoir trouver une réponse à cette situation. Des plaidoyers sont en cours auprès du gouvernement afin de sauver la situation.  « Je voudrais rassurer les producteurs pour leur dire que nous sommes en train de négocier des couloirs de livraison pour que les magasins des sociétés coopératives soient désengorgés. Et pour que les camions des transporteurs chargés de cacao soient déchargés. C’est ce que nous négocions avec le conseil café cacao et le gouvernement ivoirien pour que les opérateurs du cacao et du café soient soulagés et cela va certainement impacter positivement le monde paysan. Tout doit être mis en œuvre pour assister les sociétés coopératives, les acheteurs et dédommager les producteurs », a—t-il assuré.  

Les producteurs de l’Ouest montagneux ont bien accueilli les démarches de l’Apropa-Ci. Cependant, ils ont déploré ce qu’ils appellent «le mutisme de l’Etat » qui d’après eux reste muet face à cette situation.

« Vous nous avez convaincu, mais ce que nous n’arrivons pas à comprendre c’est le silence du gouvernement face à cette grave crise que connaît la filière cacao, qui est tout de même la première mamelle nourricière de notre pays. Il faut que l’Etat aussi nous rassure, il faut que le ministre de l’agriculture s’exprime aussi sur le sujet », a recommandé A. K. jeune planteur à Duékoué.

Dans la plupart des localités visitées, des producteurs ont indiqué que leurs difficultés quotidiennes les ont amenées parfois à brader leur cacao à des prix dérisoires en dessous du prix homologué. Conscients de ce qu’ils se rendent complices du non-respect du prix  bord champ, ces planteurs refusent catégoriquement de révéler les noms de ces acheteurs véreux. D’autres selon Doua Blondé Obed se disent prêts à aller à l’usure, tellement la situation devient intenable.

Il se dit confiant de ce que le dialogue amorcé avec le gouvernement et le conseil café cacao portera pour le bonheur des producteurs. 

Kindo Ousseny à Man

Loading

Partager, c'est aimer!

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *