Conflit foncier dans le Bafing/ Comprendre la crise Sifié-Bondoulô et ses implications

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Le jeudi 22 mars 2018, Un conflit foncier a provoqué un violent affrontement entre les villages de Sifié-Mahou et Bondounlô situés dans la sous-préfecture de Ouaninou. À l’origine se trouve un désaccord sur le foncier.

Aperçu de cases incendiées à Bondounlô

Le litige qui a lieu dans cette localité est devenu inextricable. Chaque camp tire le drap de son côté. Si des populations pour le moins parentées et fortement liées par l’histoire et la sociologie en sont arrivées aux mains, c’est parce que les intérêts se croisent et s’entrechoquent depuis plusieurs années.

Ce conflit qui dure depuis 6 ans, se trouve son origine dans le fait que Sifié-Mahou et Bondounlô ne s’accordent pas sur la limite naturelle entre les deux villages.

Bamba Laoula, chef de village de Bondounlô demande que ses agresseurs soient arrêtés

Selon Bamba Laoula, chef de village de Bondounlô, son village reconnaît la rivière Guê comme la ligne de démarcation. “Cela a toujours été ainsi. Et toutes les assises devant la chefferie comme devant le sous-préfet de Ouaninou, ont confirmé cela. Ce n’est pas aujourd’hui qu’on va trouver une autre limite”, dénonce M. Bamba qui s’explique difficilement l’absence de répression et d’arrestation des jeunes qui ont incendié neuf cases de son village en plus de plusieurs autres dégâts importants le 22 mars dernier.

À son tour, M. Diomandé Vessou, chef du village de Sifié-Mahou proteste. Selon lui “nous Diomandé sommes les propriétaires terriens de toute cette zone. C’est avec le village Tiahoué seul que nous parlons limite et non avec Bondounlô qui a été installé bien plus tard par nos voisins de Tiahoué. La rivière Guê qu’ils (les habitants de Bondounlô) réclament tant comme ligne de démarcation relève de leur imagination puérile. Nos ancêtres nous ont légué toute cette parcelle, et depuis toujours nous faisons nos champs au-delà de la rivière qui passe juste à quelques pas de mon village Sifié-Mahou”, se défend le chef Diomandé qui pointe un doigt accusateur vers les sous-préfets qui se sont succédés depuis l’avènement de ce conflit.

Diomandé Vessou, chef de village de Sifié-Mahou, dénonce la partialité de l’administration

“Nos différents sous-préfets ne sont pas sans reproche dans cette affaire. Ils prennent toujours fait et cause pour Bondounlô”, accuse Diomandé Vessou, très amère.

Selon lui, son village Sifié-Mahou ne va jamais céder son territoire à son voisin Bondounlô qu’il accuse également d’avoir un parc à bétails dont l’action est néfaste sur les cultures champêtres.

Quand un micro conflit s’étend sur deux cantons 

La guerre que se mènent les villages de Sifié-Mahou et Bondounlô a jeté ses racines dans le sol loin d’eux pour atteindre les cantons Toubako et Zingouôma. Chacun se sentant dans la position féodale de défendre son vassal.

Rencontré la nuit même de notre reportage, le chef de canton Toubako appelé Diomandé Lanciné, s’est voulu d’abord prudent sur la question. Mais il a fini par avouer que Bondounlô n’a pas raison dans ce litige foncier. “Les jeunes de Bondounlô ont été les premiers à agresser des jeunes de Sifié dans leur propre champ sous le prétexte qu’ils sont sur leur parcelle. Or en vérité, Bondounlô ne peut réclamer la terre. Il a été installé par Serifina qui dépend de Tiahoué. Si on doit parler de délimitation, ce sera donc entre Sifié et Tiahoué”, a tranché le natif de Ganhoué qui dit avoir entrepris plusieurs négociations en vain.

Pour leur part, les villages de Tiahoué et Serifina sont sur la même position invariable. “On est tous d’accord que la rivière Guê est la limite entre Sifié-Mahou et nous. Et comme Serifina est le tuteur de Bondounlô, donc Bondounlô se démarque de Sifié-Mahou à partir de cette même rivière. Partout où on ira, c’est la même chose que nous dirons. Et puis, il faut que Sifié arrête d’agresser nos hôtes de Bondounlô auquel cas nous nous sentirons dans l’obligation de réagir”, prévient Bamba Vafoungbé, notable de Serifina.

Mais Bamba Sekou, secrétaire général de la mutuelle de développement de Tiahoué, se veut pacifiste : “Nous ne sommes plus à l’époque des guerres tribales où un village s’attaquait à un autre impunément. Force doit être restée à la loi surtout que l’administration centrale et la chefferie traditionnelle ont entériné la décision faisant de la rivière Guê la limite entre Tiahoué et Sifié”. 

Le corps préfectoral qui nie toute implication partisane dans cette guéguerre, par la voix du sous-préfet  de Ouaninou Bawa Bity Tanguy demande à toutes les parties de privilégier la négociation pour garantir la cohésion et la paix. Il encourage les leaders d’opinion et les cadres de la localité à sensibiliser les populations dans ce sens. En attendant une issue heureuse, les différents protagonistes restent sur une position intransigeante

Mandé Adams

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